Alors que les critiques se font entendre en Russie après le bombardement contre une base militaire russe à Makiïvka, dans l'est de l'Ukraine, Vladimir Poutine a exhibé mercredi une nouvelle fois les missiles hypersoniques Zircon, un des fleurons de l’arsenal de Moscou. Une manière de répondre à cette attaque et au déploiement en Ukraine du système de défense antiaérien américain Patriot.

L'onde de choc du bombardement de Makiïvka, la ville ukrainienne proche de Donetsk, dans le Donbass, dans la nuit du 31 décembre 2022 au 1er janvier 2023, qui aurait tué 89 soldats russes d'après Moscou, continue de faire des vagues en Russie.

Soucieux de ne pas laisser le champ libre aux critiques et de reprendre la main sur la communication en détournant les regards du fiasco de Makiïvka, Vladimir Poutine a contre-attaqué en assistant en visioconférence, mercredi 4 janvier, au lancement en mission d'un navire de guerre équipé de nouveaux missiles de croisière hypersoniques Zircon.

"Je suis sûr que des armes aussi puissantes vont permettre de protéger efficacement la Russie des menaces extérieures et aideront à défendre les intérêts nationaux", a déclaré le maître du Kremlin lors de cette cérémonie, à laquelle assistait le ministre de la Défense Sergueï Choïgou depuis un lieu non précisé.

"Il fallait apporter une réponse à cet échec sur le terrain alors qu'aujourd'hui, la Russie cache moins ses morts qu'avant, estime Lukas Aubin, directeur de recherche à l'Iris, docteur en géopolitique spécialiste de la Russie. Vladimir Poutine prépare la riposte avec cette image de navire de guerre équipé de missiles hypersoniques. Néanmoins on ne sait pas encore la teneur de cette réponse".

Pour les experts, il s'agit également d'une riposte de Moscou à la promesse de l'administration Biden de fournir à Kiev le système de défense antiaérienne Patriot, le plus performant et le plus sophistiqué dont dispose l'armée américaine. C'est dans ce sens que Sergueï Choïgou a tenu à souligner mercredi que les missiles Zircon étaient "capables de surmonter tout système de défense antiaérienne actuel ou futur". Une allusion à peine voilée au système Patriot.

Le Zircon n'est, en effet, pas n'importe quel missile puisqu'il est hypersonique, c'est-à-dire capable de dépasser la vitesse de Mach 5 (6 174 km/h) "pour toucher n'importe quelle cible à 1 000 km de distance", avait assuré Vladimir Poutine, le président russe, lors d'un discours en décembre 2018 durant lequel il avait confirmé l'existence de ces armes de nouvelle génération.

"Pendant le vol, le missile serait entièrement recouvert d'un nuage de plasma qui absorbe tout rayon de radiofréquences et rend le missile invisible aux radars. Cela lui permettra de rester indétectable", explique le think tank américain Missile Defense Advocacy Alliance, dans une note d'information sur le Zircon.

Quelle efficacité sur le champ de bataille ukrainien ?

Impossible de savoir combien de missile de ce type, fabriqué par l'entreprise russe KB Mashinostroyeniya (KBM) et mesurant entre huit et neuf mètres de long, dispose la Russie, ni dans quelle mesure elle peut en produire malgré les sanctions qui la frappent.

D'aucuns s'interrogent également sur leur efficacité dans le conflit ukrainien, alors qu'en mars 2022, le ministère russe de la Défense avait déclaré avoir utilisé des missiles hypersoniques "Kinjal" dans l'ouest de l'Ukraine, sans que cette affirmation ne soit confirmée par une autre source.

Les armes hypersoniques  – considérés par une partie des experts militaires comme les "armes du futur" – ont l'avantage de pouvoir être téléguidées, contrairement aux missiles balistiques traditionnels, qui ne peuvent pas changer de trajectoire en plein vol. De ce fait, ce type d'armement est censé être bien plus efficace contre des cibles mouvantes, comme les bateaux de guerre.

"Les Zircon sont, prioritairement, des missiles antinavires qui peuvent être utilisés accessoirement pour viser des cibles terrestres", avait confié Gustav Gressel, spécialiste des questions militaires russes au Conseil européen pour les relations internationales, dans un article publié par France 24 en octobre 2021.

Ce qui est certain, c'est que la Russie a commencé à développer et à investir massivement dans les Zircon au début des années 2010 , tandis que "l'Europe et les États-Unis ont sans arrêt repoussé la modernisation des armements stratégiques ces dernières années, et le niveau technologique d'une partie de leur équipement remonte aux années 1990", expliquait dans le même article Alexandre Vautravers, expert en sécurité et en armement et rédacteur en chef de la Revue militaire suisse (RMS).

À l'époque, il précisait que les efforts américains pour mettre en place un bouclier antimissiles n'ont pas permis d'avoir un système de défense "capable d'intercepter tous les missiles déjà existants ; un tel système serait encore moins efficace face à des missiles hypersoniques, plus rapides et plus manœuvrants".

France 24

 

 

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